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Léducation Il ne semble pas préférable de commencer à réfléchir sur léducation en se demandant directement quelle est sa définition. Répondre à deux autres questions permettra de savoir non pas ce quest, de fait, léducation, mais ce quelle devrait être ou ce que lon voudrait quelle soit. On notera que lordre dans lequel sont posées ces questions est ici déterminant. Premièrement, quel doit être le but ou quels doivent être les buts visé(s) par léducation ? Létymologie ne sera pas ici dun grand secours : éduquer, cest en latin « conduire hors de », mais hors de quoi ? Même si lon précise « hors de lenfance », il faudra dabord expliquer à quel modèle dadulte on veut conduire lenfant, et il faudra ensuite montrer que les adultes nont plus à être éduqués, ce que lexpérience commune réfute quotidiennement. Un peu plus concrètement, toute une tradition philosophique en général et humaniste en particulier voudrait faire de léducation le moyen par lequel le plus grand nombre dhommes possible parviendront à leur complet épanouissement intellectuel au sens le plus large des termes, épanouissement dont la nature est par ailleurs sujette à débat. On a également souvent assigné une fonction politique à léducation : celle-ci devrait disposer les hommes à être de futurs et bons ! citoyens. Mais dautres rétorqueront que ces nobles (?) idéaux ne sont que de dangereuses chimères, et que léducation doit avant tout préparer les hommes à être matériellement indépendants, cest-à-dire leur donner les capacités dacquérir voire leur donner tout court une profession. Les efforts de tous les acteurs de léducation devraient alors être tournés vers cette intégration à la société par le domaine professionnel. La question qui se pose alors est de savoir si ces différents objectifs sont conciliables et si dans ce cas il faut en opérer un savant équilibre ou sil faut en privilégier un lequel ? , quitte à devoir renoncer aux autres. Deuxièmement, quels seront les moyens dune telle éducation ? Autrement dit, comment parvenir aux buts préalablement définis ? Et notamment, qui aura la charge de léducation ? On a à ce sujet suffisamment remarqué que léducation était en fait la combinaison de plusieurs influences. La famille, lécole et, dune manière plus générale, tous les groupes et les milieux sociaux auxquels une personne est confrontée au cours de sa vie, participent à son éducation. Il faut toutefois remarquer que certains philosophes et écrivains sont allés jusquà contester le droit des parents à éduquer leurs enfants, et il semble encore plus légitime à certains de vouloir supprimer la responsabilité de lEtat en matière déducation. Et bien que les compétences éducatives de la famille ou de lEtat ne semblent pas en elles-mêmes contestables, cest toujours laccusation dinefficacité qui tente de justifier ces transferts dautorité. On voit bien ici que la question des buts de léducation conditionne catégoriquement celle de ses moyens et des personnes qui en ont la charge. Or aujourdhui, cest le contraire qui semble se mettre en place : la question des moyens conditionne celle des fins. Car léducation est devenue un marché, cest-à-dire une source potentielle de profits économiques pour les grandes entreprises. Celles-ci lont bien compris, puisquelles cherchent juste retour des choses, diront certains à déposséder lEtat de sa mission éducative, notamment par le financement de la recherche. En se rendant ainsi indispensables à la société, elles sont de plus en plus à même de décider des fins de léducation à venir : celles-ci seront, espèrent-elles, purement professionnelles, et développeront aussi peu que possible lesprit critique luxe inutile et même nuisible pour un bon travailleur. Marc Anglaret |
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