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Lautre Lautre évoque laltérité, la différence. Mais, il renvoie aussi à une identité. Comment le comprendre à la fois sans que sa différence soit insaisissable et sans quelle soit niée ? On peut évoquer deux mouvements de pensée pour comprendre lautre et deux champs dans lesquels il est susceptible dapparaître. Le "premier" mouvement est celui qui consiste à comprendre lautre à partir dune identité préalable. Par exemple, je conclus à lexistence de lautre parce quil parle, cest-à-dire exprime sa pensée comme moi qui exprime ma pensée en parlant. Quoiquil soit nécessaire pour cela dapprofondir la question de ce quest parler, distinguer lautre comme être pensant, du robot ou de lanimal, semble possible. Lautre diffère alors de moi parce que je me comprends pensant immédiatement alors que cest indirectement, par la parole donc, que je comprends lautre. Le "second" mouvement est celui qui consiste à me comprendre à partir de lautre. Par exemple, mon identité mapparaît sous le regard de lautre, miroir de ma réflexion, dans le rapport à lautre. Ainsi, sans lautre, présent réellement ou non, comment pourrais-je ressentir la honte, cest-à-dire être honteux ou être jaloux ? Lautre diffère de moi en tant que ce nest pas lui qui est honteux ou qui est jaloux. Le problème est alors le suivant : suis-je dans ma connaissance ou dans mon rapport à lautre premier, ou bien ai-je besoin de lautre pour être et pour me connaître moi-même ? Bref, de moi ou de lautre, lequel est premier ? Le "premier" champ où lautre apparaît est le champ théorique. On peut le définir par la question : "Quest-ce que lautre ?" Non seulement, lautre que moi, mais également, le barbare, le sauvage, létranger, voire lautre en général. On peut à ce premier champ appliquer les deux mouvements de pensée évoqués ci-dessus. Par exemple, est-ce que je conclus à la barbarie en massurant que je suis civilisé ou bien est-ce que mon identité de civilisé mapparaît à partir de la barbarie ? Le "second" champ où lautre apparaît est le champ pratique. On peut le définir par la question : "Quel rapport à lautre est-il légitime ?" Par exemple, dois-je respecter lautre, non seulement, lautre que moi, mais également le barbare, le sauvage, létranger, le criminel, le monstre, etc.? On peut également appliquer à ce second champ les deux mouvements de pensée évoqués ci-dessus. Dois-je respecter lautre parce quil est comme moi, ou bien est-ce son altérité qui appelle le respect ? Par exemple, lami, le concitoyen voire lautre homme, dois-je le respecter parce quil est comme moi, un ami, un concitoyen, un autre homme, ou bien est-ce parce quil appelle le respect, en tant quautre, quil me faut le respecter ? Enfin, lequel de ces deux champs est premier ? Cest-à-dire lautre mapparaît-il dabord dans le champ pratique ou bien dans le champ théorique ? Est-ce que ma façon dagir avec lautre provoque la réflexion théorique sur lautre ou bien celle-ci détermine-t-elle cet agir ? Patrice Bégnana |
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