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La liberté

   "Vivre sans contraintes", "faire ce qui me plaît", "faire ce que je veux", telles sont quelques-unes des définitions courantes de la liberté. Toutes présupposent que nous savons ce qu’est la liberté. Le seul problème serait d’analyser les conditions qui nous permettraient de l’être. Ce qui présuppose aussi que la liberté existe. Mais, si nous nous trompons sur ce qu’est la liberté, ne risquons-nous pas de poursuivre une chimère ? Ne risquons-nous pas de nous croire libre alors que nous ne le sommes pas ?

   En effet, aucune de ces définitions courantes de la liberté ne va de soi.

   "Vivre sans contraintes" serait être libre ! Mais, n’est-ce pas toujours moi, par mes projets, qui détermine ce qu’est une contrainte ? Certaines contraintes ne sont-elles pas voulues, parce qu’elles servent mon projet ?

   "Faire ce qui me plaît". Mais, suis-je la source de ce qui me plaît ? Mes goûts, mes désirs ne sont-ils pas façonnés ? La vieille dame Tupinamba qui se délecte de la chair d’un enfant de prisonnier a-t-elle forgé elle-même son goût ? Sommes-nous bien sûr que nos goûts viennent bien de nous ?

   "Faire ce que je veux". Encore faut-il que je puisse vouloir par moi-même et donc que ma volonté soit libre. Si tel est le cas, il m’est impossible de ne pas faire ce que je veux. Par contre, il se peut que je n’obtienne pas ce que je désire. Entreprendre l’ascension du Mont-Blanc ou tenter de m’évader si je suis enfermé sont mes volontés. Mais, les limites de mes forces m’empêcheront peut-être de réaliser mes projets.

   Ces difficultés remarquées, poser les problèmes philosophiques relatifs à la liberté est possible.

   Le premier concerne l’idée de volonté libre. Que je sois conscient de me décider à agir de telle façon ou à avoir tel projet, est-il suffisant pour que j’affirme que ma volonté est bien libre, c’est-à-dire qu’aucune cause de moi inconnue ne me détermine à mon insu à penser et à agir ? L’idée de morale, c’est-à-dire de prescriptions et d’interdits qui m’obligent à faire le bien et à ne pas faire le mal, semble impliquer une volonté libre. En effet, comment pourrais-je être tenu pour responsable d’un acte si je n’en suis pas l’auteur. Ce n’est pas le couteau que l’on accuse de meurtre, ce n’est pas la pièce de monnaie qui fait preuve de charité. Ils sont agis. Sans donc la possibilité d’être celui qui commence absolument l’action, aucune faute, aucun mérite ne pourraient m’être imputés. Mais, l’idée de morale suffit-elle pour que j’admette que j’aie une volonté libre ?

   Le second concerne la liberté politique. Consiste-t-elle à ne subir aucune contrainte de la part des autres, réside-t-elle uniquement dans l’espace privé qui m’est laissé ou bien consiste-t-elle à agir avec les autres dans le cadre d’un espace public ?

   Le troisième problème concerne les deux sens de la liberté : comment s’articulent-ils ? La liberté réside-t-elle seulement dans la libre volonté ? Mais alors, que serait une liberté qui ne s’exercerait que dans les fers ?

   N’est-ce donc pas dans la politique et seulement en elle que la liberté est possible ? Mais comment la liberté politique pourrait-elle être possible si nous sommes déterminés, notamment par des causes sociales ou économiques, à agir à notre insu ?

Patrice Bégnana

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