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Le médiéviste et les nouveaux inquisiteurs

(à propos du livre de Sylvain Gouguenheim Aristote au Mont Saint-Michel)

Cet article a été publié pour la première fois sur Mezetulle, le blog de Catherine Kintzler
(http://www.mezetulle.net/)

   Les lignes qui suivent n’ont pas pour objet les thèses soutenues par Sylvain Gouguenheim dans Aristote au Mont Saint-Michel, mais l’accueil qui a été réservé à cet ouvrage. Son auteur a-t-il, comme l’en accusent ses détracteurs, sous-estimé les aspects positifs de la domination musulmane ? De l’importance  respective des filières orientales et occidentales, chrétiennes et islamiques, latines et byzantines, dans la diffusion et la transmission du savoir grec, il appartient aux médiévistes de discuter, et l’on peut gager que les meilleurs d’entre eux ne le feront pas sous forme de pétitions. Ce qui ne laisse pas de surprendre, ou sinon de surprendre, hélas, du moins d’inquiéter, c’est la violence des réactions suscitées par la publication d’un ouvrage qui, tout en s’adressant à un public plus large que celui des spécialistes, appuie sur une solide et vaste érudition un propos qui ne ressortit pas au genre polémique, à moins, comme l’indique l’auteur dans son avant-propos, qu’on ne considère comme polémique le simple souci de défendre ce qui nous paraît vrai contre ce qui nous paraît faux. C’est pourtant ce qui est donné à croire aux lecteurs de Télérama : le livre de Gouguenheim est un « pamphlet »[i], affirme le journaliste Thierry Leclère », un « fumeux pamphlet »[ii], précise M. Youssef Seddik. Le lecteur d’Aristote au Mont-Saint-Michel aura pourtant bien du mal à trouver ce qui justifie cette infâmante qualification, que ce soit dans le contenu de l’ouvrage ou dans le ton adopté par son auteur. Celui-ci vise davantage une opinion communément répandue que les travaux scientifiques, naturellement moins grossiers, qui ont pu contribuer à l’accréditer et peu nombreux sont les universitaires qui sont nommément mis en cause. Lorsqu’ils le sont, comme Alain de Libera dès les premières lignes de l’introduction, c’est à travers des formules qui ne dérogent jamais aux règles de la courtoise controverse académique : « c’est cette « évidence » que je crois pourtant possible de discuter »[iii]. Ou plus loin : « je ne peux suivre Alain de Libera qui crédite l’Islam d’avoir effectué la « première confrontation de l’hellénisme et du monothéisme » - oubliant les Pères grecs ! »[iv]. Ou encore : « c’est pourquoi je ne suis pas ici D. Jacquart et F. Micheau qui, s’appuyant sur ce verset, jugent que … »[v]. Ou derechef : « la position adoptée conduit M. Detienne à porter des jugements contestables … »[vi]. La réplique d’Alain de Libera publiée par Télérama se situe dans un registre passablement différent : le sous-titre de l’ouvrage de Gouguenheim y est qualifié d’ « insidieux »[vii] tandis qu’y sont stigmatisées « l’islamophobie ordinaire » et la « double amnésie nourrissant le discours xénophobe » (M. de Libera se cite alors lui-même dans Le monde diplomatique) avant que soit rejetée avec dégoût une Europe qui serait celle du « ministère de l’immigration et de l’identité nationale » et des « caves du Vatican »[viii]. De son côté M. Max Lejbowicz n’est pas en reste de formules affables : « titre accrocheur », « compagnonnages inavoués », « insuffisances manifestes », « toupet », « désinvolture »[ix]. Pour leur part, MM. Martinez-Gros et Loiseau dénoncent une « démonstration suspecte » et des « fréquentations intellectuelles (…) pour le moins douteuses »[x], rejoignant sur ce terrain 56 « chercheurs » qui ont trouvé chez Gouguenheim un « projet idéologique aux connotations politiques inacceptables » et du « racisme culturel »[xi]. M. Blaise Dufal, « doctorant » à l’EHESS inscrit le livre de Sylvain Gouguenheim dans le courant d’une « pensée catholique « néo-conservatrice » et estime qu’il n’aurait pas dû être publié « par un éditeur de référence »[xii]. M. Thierry Leclère, le journaliste déjà cité de Télérama, flétrit dans cet hebdomadaire les « propos islamophobes » et les « inepties »[xiii] de Sylvain Gouguenheim tandis que M. Youssef Seddik, toujours dans Télérama, ne mâche pas ses mots : « répugnant dessein (…) réduction raciste » (…) il est stupide qu’un historien … »[xiv].

Universitaires et pamphlétaires

   Pour peu qu’il prenne la peine de lire Aristote au Mont-Saint-Michel, et pas seulement les tribunes qui accablent son auteur, le lecteur verra bien de quel côté se trouve le ton du pamphlet. Il en va de même si l’on a égard au contenu de l’ouvrage qui, se cantonnant dans un terrain strictement historique, ne comporte guère de références à l’actualité et ne s’aventure pas dans ce « va-et-vient entre le passé et le présent »[xv]qu’Alain de Libera revendique pour lui-même dans Penser au Moyen Âge, s’exposant ainsi à illustrer ce que Paul Ricoeur appelait le « moi pathétique »[xvi]. La comparaison des deux livres est éclairante. Dans le sien, Alain de Libera ferraille avec Le Pen, « le paladin de la Trinité (sur-Mer) »[xvii], blâme la spéculation immobilière et la concentration de la main d’œuvre dans des cités-dortoirs, ironise sur la messe en latin et fulmine une sentence contre le « racisme vestimentaire »[xviii] qui a présidé, selon lui, à la querelle du foulard islamique :

 « Est-il si difficile d’admettre qu’une jeune musulmane refuse de s’affubler d’un « 501 déchiré aux genoux, aux cuisses ou aux fesses » ?  Est-il interdit de penser que le port universel du jean produit des hommes-sandwiches, qu’il transforme l’individu en support de marques « sponsorisant » un rêve que l’on achète, qu’il impose une nouvelle forme d’usure : celle du vêtement inusable, à la fois monnaie d’échange et valeur refuge, uniforme de vies interchangeables autant que premier signe visible de l’identité sociale ?  L’école n’a pas à prescrire un look, mais à accueillir tout le monde … »[xix].

 On reste un peu ébahi devant cette étourdissante rhétorique qui laisse entendre que la commission Stasi a débouché sur une loi dont la scélératesse aurait consisté non seulement à proscrire le port de signes religieux à l’école, mais encore à prescrire celui du jean à tout le monde et celui du « 501 » troué aux fesses aux jeunes musulmanes… Entendons-nous bien : il n’y a rien de honteux à désapprouver la loi sur les signes religieux, même si on peut le faire sans traiter de « racistes » ceux qui l’approuvent ; il n’y a rien de blâmable à dénoncer la spéculation immobilière, même si, ce faisant, on ne s’expose guère à rencontrer la contradiction ; il n’y a rien de déshonorant à vitupérer Le Pen et feu Mgr Lefebvre, même si on court ainsi moins de risques qu’à vitupérer Mahomet ou l’intégrisme islamiste. On comprend mal en revanche que si ces considérations ont leur place dans un ouvrage à prétention « scientifique », le livre de Gouguenheim ait pu être qualifié de « pamphlet » et l’on ose à peine imaginer ce qu’auraient dit les journalistes de Télérama et les pétitionnaires de l’ENS-LSH, soucieux de la réputation scientifique de leur école, si Gouguenheim s’était permis ce que se permet Alain de Libera.

La race des signeurs

   Partons de la pétition de l’ENS-LSH : on pourra ainsi prendre la mesure de l’amour de la science qui anime les pétitionnaires. Ceux-ci considèrent le livre de Sylvain Gouguenheim comme « inattendu et iconoclaste », au rebours des 56 chercheurs pour lesquels « ce qui est présenté comme une révolution historiographique relève d’une parfaite banalité ». Cette  distorsion tient peut-être à ce que les historiens ne sont pas légion parmi les pétitionnaires : à peine 27 sur plus de 200 (2 professeurs, 10 maîtres de conférences, 7 ATER, 1 PRAG, 2 enseignants, 3 élèves, 2 anciens élèves et 1 ancien auditeur). Ce déficit explique peut-être que l’une des signataires, professeur de philosophie, prenne soin de préciser qu’elle est elle-même la veuve d’un autre ancien élève, historien lui, lequel se trouve ainsi, par alliance et à titre posthume, enrôlé dans la troupe des pétitionnaires. Pour en finir avec les détails cocasses, signalons que les auteurs de la pétition affirment que c’est de son appartenance à l’ENS-LSH que Sylvain Gouguenheim « tire pour bonne part sa légitimité ». On fera observer à tous ces élèves et la plupart de ces anciens élèves que M. Gouguenheim tire avant tout sa légitimité des travaux universitaires qui lui ont permis d’accéder au grade de professeur des universités et aux fonctions de professeur à l’ENS-LSH tandis que c’est eux, au contraire, qui, faute d’avoir fait leurs preuves, n’ont, pour le moment, d’autre légitimité que la qualité d’élève ou d’ancien élève dont ils excipent complaisamment. L’essentiel est ailleurs : n’ayant rien à dire sur le livre de Gouguenheim, ils s’émeuvent de ce que celui-ci « sert actuellement d’argumentaire à des groupes xénophobes et islamophobes qui s’expriment ouvertement sur internet ». Pire encore, on aurait trouvé sur le site Occidentalis un commentaire signé Sylvain G. Tout en convenant que « rien de ce qui circule sur internet n’est a priori certain », les pétitionnaires réclament « une enquête approfondie » et, davantage, «une enquête informatique approfondie ». Mais qui donc va diligenter cette enquête ? Quel juge d’instruction ? Saisi par qui ? Sur la base de quel délit ? Toujours est-il que l’idée de créer un tribunal de l’inquisition informatique pour juger un médiéviste est une bien belle idée, et qui a au moins le mérite de réconcilier tradition et modernité. Ce n’est pas en vain que le contribuable finance les études des normaliens. 

Liaisons dangereuses sur internet

   Que les thèses d’Aristote au Mont-Saint-Michel soient favorablement évoquées sur « certains sites internet extrémistes »[xx] est un des plus itératifs arguments utilisés contre son auteur : on le retrouve aussi bien dans la diatribe des 56 chercheurs que dans celle de MM. Martinez-Gros et Loiseau. On pourrait s’étonner de rencontrer semblable argument sous la plume d’universitaires dont la plupart jugeraient probablement du dernier vulgaire qu’on imputât à Nietzsche, par exemple, les conceptions de tous ceux qui se sont placés sous son patronage. Cependant puisque c’est d’internet qu’il s’agit, il est peut-être  utile d’aller voir ce que l’on trouve sur les sites en question. Occidentalis  recommande la lecture des derniers livres de Chahddortt Djavann et du général Bigeard, ce qui ne permet peut-être pas de subodorer de fortes affinités intellectuelles entre ces deux auteurs. Mais il y a plus étonnant : non seulement le premier livre de Chahddortt Djavann, Bas les voiles, avait fait l’objet d’une recension favorable dans le journal L’Humanité en date du 9 octobre 2003, mais le second, Ce qu’Allah pense de l’Europe, celui-là même que recommande le site Occidentalis, est également vanté sur le site Débat militant  Lettre publiée par des militants de la LCR dans les termes suivants : « son livre est un outil indispensable pour les révolutionnaires et les progressistes qui militent contre le racisme, pour l’unité des opprimés et veulent combattre pour la démocratie ». (Lettre 59 du 11 février 2005). Que de fréquentations intellectuelles douteuses pour Chahddortt Djavann ! On ne sait pas trop si elle est compromise avec l’extrême droite ou avec l’extrême  gauche, mais ses accointances avec l’extrémisme ne font, elles, pas de doute … Poursuivons notre enquête. Dans la rubrique Cinéma du site des Identitaires figurent des critiques louangeuses de La vie des autres, Les chiens de paille, L’empire des sens, Le feu follet, Dogville, tandis que dans la rubrique Livres on recommande la lecture de Malek Chebel et de Slavoj Zizek.  Le site du Groupe Sparte recense élogieusement L’avènement de la démocratie de Marcel Gauchet et Impasse Adam Smith de Jean-Claude Michéa. Et que dire du site de L’esprit européen où des textes de Régis Debray, Michel Jobert, Emmanuel Todd, Jean Baudrillard et Georges Corm voisinent avec ceux de Jean Cau et d’Alain de Benoist ? En voilà des compagnonnages inavoués ! Si l’internaute n’est pas fatigué, qu’il se rende alors sur le site officiel de Tariq Ramadan : dans la rubrique « Coups de cœur » il y trouvera, à côté d’autres textes, celui de la chanson L’aigle noir de Barbara. Faut-il en conclure que Barbara aurait réclamé un « moratoire » sur la lapidation des femmes réputées infidèles ? On dira peut-être que Barbara n’est plus là pour protester contre sa présence sur le site de Frère Tariq. Soit, mais Alain de Libera est, lui, bien vivant. Dans son article de Télérama il écrit : « Je pourrais m’indigner du rapprochement indirectement opéré dans la belle ouvrage entre Penser au Moyen Âge et l’œuvre de Sigrid Hunke, « l’amie de Himmler ».[xxi] Monsieur le Professeur ordinaire à l’Université de Genève aurait pu s’indigner du rapprochement beaucoup moins indirect[xxii] opéré sur le site oumma.com qui célèbre les « excellents travaux » d’Alain de Libera (5 juillet 2006) et le « merveilleux ouvrage » de l’idéologue nazie (10 février 2004).

La méthode de l'omelette

   Il est vrai qu’on ne reproche pas seulement à Sylvain Gouguenheim la présence de son livre sur des sites extrémistes, mais encore les remerciements qu’il a adressés à un auteur « proche de l’extrême droite »[xxiii], M. René Marchand. Les qualités d’ancien élève de l’école nationale des langues orientales et d’arabisant de ce dernier ne sont jamais mentionnées, les opinions politiques qu’on lui prête suffisant manifestement à le disqualifier et, par ricochet, à discréditer le travail de Gouguenheim. Les 56 chercheurs écrivent : « On n’est alors plus surpris de découvrir que Sylvain Gouguenheim dit s’inspirer de la méthode de René Marchand (page 134), auteur, proche de l’extrême droite … ».[xxiv] Que le lecteur se reporte donc à la page 134 pour découvrir quelle est la méthode de René Marchand dont Sylvain Gouguenheim s’inspire coupablement. L’auteur y écrit ceci, et seulement ceci : « Il faut, selon les mots de R. Marchand, « détecter la réalité derrière le vernis de l’histoire recomposée ». Chercher à détecter la réalité derrière les apparences de l’histoire recomposée serait donc une méthode d’extrême droite ? Ce qui veut dire que les historiens qui n’appartiennent pas à ce courant politique ne soupçonnent pas que la légende puisse se mêler à l’histoire ? Qu’ils accueillent les témoignages fournis par les documents sans les critiquer ? Qu’ils n’imaginent pas que les faits rapportés dans les récits ont pu être déformés, volontairement ou involontairement, par les intérêts, les passions ou les illusions de ceux qui les ont rapportés ? On aimerait que cette méthodologie de l’histoire pour le moins inattendue fût explicitée. En attendant on conseillera à ceux qui tiennent que l’omelette de la mère Poulard nécessite, pour être réussie, l’usage d’une poêle à long manche et un feu de bois bien vif, de s’assurer que cette méthode n’a pas été préconisée par des cuisiniers d’extrême droite.

Etes-vous un raciste culturel ?

   Inusable procédé, la reductio ad hitlerum a encore de beaux jours devant elle, d’autant  qu’elle se redouble aujourd’hui de ce qu’on pourrait appeler une reductio ad contemptionem generis. L’ouvrage de Gouguenheim est en effet accusé par les 56 chercheurs de déboucher sur un « racisme culturel ». Un « racisme culturel », c’est-à-dire, si les mots ont encore un sens, un racisme qui n’a rien à voir avec la notion de race : l’important pour nos chercheurs n’est pas de trouver le mot juste, mais le mot qui tue. Les chercheurs ont cherché, et ils ont trouvé qu’à notre époque l’imputation de racisme est l’arme absolue qui permet de discréditer un adversaire qu’on n’a ni le courage ni le talent d’affronter loyalement. Examinons cependant ce qui, dans le cas d’espèce, justifie cette imputation : « L’ouvrage débouche alors sur un racisme culturel qui affirme que « dans une langue sémitique, le sens jaillit de l’intérieur des mots, de leurs assonances et de leur résonances, alors que dans une langue indo-européenne, il viendra d’abord de l’agencement de la phrase, de sa structure grammaticale. (…) Par sa structure, la langue arabe se prête en effet magnifiquement à la poésie (…) Les différences entre les deux systèmes linguistiques sont telles qu’elles défient presque toute traduction »[xxv]. Les langues étant assimilées à des races, le racisme consisterait ici à soutenir qu’elles ne sont pas équivalentes et que certaines sont plus propres que d’autres à exprimer telle ou telle forme ou tel ou tel contenu de pensée. Notons tout d’abord que Lorenzo Minio-Paluello, cité par Gouguenheim,[xxvi]jugeait la langue arabe peu adaptée au discours philosophique : son « racisme culturel » avait-il été dénoncé par les 56 chercheurs ou ceux-ci ne l’avaient-ils pas lu ? Que le lecteur se plonge maintenant dans un ouvrage intitulé La poésie arabe classique : il pourra y lire que « la langue arabe, au niveau morphologique semble avoir partie liée avec sa poésie. (…) la langue arabe favorise des interférences entre le son et le sens »[xxvii]. Qu’il se fasse maintenant internaute et se rende sur le site Les débats (journal hebdomadaire algérien d’information et d’analyse). Il y trouvera, semaine du 5 au 11 avril 2006, un entretien d’Amine Essegui avec l’anthropologue Ahmed Amine Dellaï. A la question qui lui est posée de savoir si la langue du pays (l’arabe algérien) pourrait devenir un vecteur de savoir et aspirer à une reconnaissance académique, l’anthropologue répond : « Non, absolument pas, dans le cas du monde arabe. Pour le savoir et la connaissance scientifique, c’est déjà un grand problème pour la langue arabe classique, alors la langue populaire … ». Passons sur ce « racisme culturel » à l’endroit des langues populaires qui contrevient au principe sacré de l’égale dignité de toutes les langues … Mais M. Ahmed Amine Dellaï ne se borne pas à dire, comme Gouguenheim, que la langue arabe se prête magnifiquement à la poésie, ni comme Minio-Paluello qu’elle est peu adaptée au discours philosophique : il va jusqu’à soutenir que l’arabe classique a des difficultés à se faire le vecteur de la connaissance scientifique. Le détecteur de « racisme culturel » n’est pourtant pas au bout de ses peines – ou de ses plaisirs. En effet, l’un des pourfendeurs de Gouguenheim, M. Martinez-Gros, co-signataire de l’article intitulé Une démonstration suspecte, a publié en 2006 un ouvrage intitulé Ibn Khaldûn et les sept vies de l’Islam. On en trouve une recension dans La presse littéraire en date du 25 septembre 2006 où on peut lire ceci : « Gabriel Martinez-Gros insiste, comme A. Cheddid, sur l’importance de l’appartenance à l’Islam et de l’usage d’une langue commune, l’arabe, qui grâce à ses subtilités et ses glissements de sens réels, est l’outil idéal pour s’attaquer à l’histoire universelle ». Si ce compte rendu est fidèle, on ne pourra pas ne pas se demander ce qui, en  dehors des passions idéologiques, permettrait de considérer qu’il est raciste de dire que « par sa structure, la langue arabe se prête (…) magnifiquement à la poésie », mais qu’il n’est pas raciste d’affirmer que « grâce à ses subtilités » elle est « l’outil idéal pour s’attaquer à l’histoire universelle ».

Iconographie de l'islamophobie ordinaire

   Cependant la passion inquisitrice ne s’arrête pas à scruter ce qui, dans le texte de Sylvain Gouguenheim, pourrait permettre de lui imputer des arrière-pensées inavouables. Ainsi M. Lejbowicz commence-t-il par s’en prendre à l’illustration qui orne la première de couverture de son ouvrage. Qu’un livre intitulé Aristote au Mont-Saint-Michel soit illustré par une enluminure représentant le Mont-Saint-Michel  pourrait paraître assez naturel au profane. Malheureusement sur celle-ci le mont est surmonté d’un ciel où l’archange saint Michel affronte un dragon. M. Lejbowicz imagine tout d’abord que c’est Aristote qui est déguisé en saint Michel : « Faut-il penser qu’en éduquant l’Europe latine un Aristote exempt d’arabismes a rejoint la milice céleste ? »[xxviii]. Dans une longue note M. Lejbowicz précise que l’enluminure est extraite des Très riches heures du duc de Berry, qu’il faut la dater de 1411-1416 et non pas de 1402-1416 et il la situe en près de 200 mots dans le contexte historique de sa genèse. Puis il conclut :

« Il n’y a pas d’image innocente, aussi belle soit-elle. En valoriser une, sans prendre la précaution de préciser les conditions de sa création ni le sens que ses créateurs (les frères Limbourg) et son commanditaire (Jean de Berry, l’un des frères de Charles V) lui ont attribuées (sic), conduit à s’abstraire de l’histoire et à ouvrir les vannes de la mythologie »[xxix].

Ici on serait tenté de suggérer au lecteur de parcourir les rayons de sa propre bibliothèque afin d’y dénombrer les ouvrages dont la quatrième de couverture satisfait à ces réquisits lorsque la première comporte une illustration, mais pour lui faire gagner du temps nous l’inviterons simplement à examiner la couverture de Penser au Moyen Âge, d’Alain de Libera, dans la collection Essais des éditions du Seuil. Elle représente un oriental barbu occupé à déchirer un manuscrit. La quatrième de couverture indique qu’il s’agit d’un détail d’une fresque de S. Maria Novella dont l’auteur est Andrea Bonaiuti, mais ne donne pas son titre, encore moins évidemment les circonstances de sa création ni les intentions de son commanditaire. Tenu dans cette ignorance, le lecteur va-t-il spontanément supposer que cette image, pas du tout « innocente », représente un hérétique repenti ? Ne risque-t-il pas plutôt d’y voir le symbole de la destruction d’une bibliothèque sur l’ordre d’un calife réputant inutiles les livres qui sont en accord avec le Coran et pernicieux ceux qui ne le sont pas ? Et en ce cas, M. de Libera n’aura-t-il pas ouvert « les vannes de la mythologie » ? Eu égard à la vigilance dont font preuve M. Lejbowicz, les 56 chercheurs et tous les autres, on peut se demander comment Alain de Libera a pu échapper à l’accusation d’ « islamophobie ordinaire » et on peut supposer que c’est pour cette même raison qui a permis à M. Martinez-Gros d’éviter celle de « racisme culturel ».

   Outre la reductio ad hitlerum sous ses diverses formes, deux autres procédés sont utilisés de façon récurrente contre le livre de Gouguenheim. L’un consiste à dénoncer des erreurs de détail (il dit par exemple que Jean de Salisbury a commenté Aristote dans son Metalogicon alors que cet ouvrage n’est pas un « commentaire ») ou des défauts insignifiants qui ne changent rien à l’essentiel de ses thèses, mais qui visent à disqualifier son auteur et à éviter ainsi de discuter ses thèses en ce qu’elles ont d’essentiel. L’autre consiste, en lui faisant dire ce qu’il ne dit pas, à déceler chez lui des contradictions imaginaires. Nous examinerons le premier de ces procédés tel qu’il est exemplairement mis en œuvre dans l’article de M. Lejbowicz et le second dans le texte des 56 chercheurs.

Ignoratio elenchi

   M. Lejbowicz a soigneusement épluché la bibliographie sélective de 15 pages qui clôt l’ouvrage. Il fait apparaître que dans cette bibliographie (qui comporte quelque 275 titres), l’indication des première et dernière pages des articles ou contributions n’est pas donnée, contrairement à l’usage, pour six d’entre eux, et peut-être plus comme le suggère un « etc. ». Pire encore : Gouguenheim mentionne les trois auteurs de l’Histoire culturelle de la France (Boudet, Guerreau-Jalabert et Sot) selon l’ordre alphabétique de leur nom et non, comme il se doit, en commençant par celui de M. Sot, qui a dirigé l’ouvrage. Sylvain Gouguenheim n’est-il pas ainsi bien réfuté ? Semblable cuistrerie prêterait à sourire, si on ne redoutait qu’elle n’impressionnât les « amateurs ». Que trouve-t-on  d’autre dans cet article ? D’une part un long développement qui se rapporte à une dizaine de lignes de la page 184 de l’ouvrage. Gouguenheim y écrivait que la « répugnance à faire œuvre individuelle, caractéristique de la chrétienté médiévale »[xxx] a pu conduire certains penseurs « à taire leur originalité et à attribuer leurs découvertes à autrui »[xxxi]. A l’appui de cette hypothèse il citait un passage d’Adélard de Bath dans lequel celui-ci affirme que les préventions de ses contemporains à l’égard des nouveautés le conduisent à attribuer ses idées personnelles à d’autres et plus particulièrement à faire croire qu’il les a tirées de ses études arabes. M. Lejbowicz s’évertue à montrer que cette ruse n’a de sens que si les savoirs arabes et les savants arabophones sont prisés à l’époque. Cela va de soi, mais comme cette évidence n’est pas contestée dans le texte de Gouguenheim, ce verbeux et laborieux développement relève de ce que les logiciens appellent, en deux mots et en latin, ignoratio elenchi. Tout le reste de l’article de M. Lejbowicz est consacré à établir, à propos de l’arithmétique, de l’analyse et de l’astronomie, que le niveau atteint par les mathématiciens arabophones et, grâce à eux, par les médiévaux latins, était nettement supérieur à celui des Grecs de l’Antiquité. C’est probablement vrai, et il est possible que Gouguenheim ait sous-évalué ce niveau, mais si c’est le cas, cela ne touche pas à ce qui est au cœur de sa thèse, celle du « filtrage » du savoir grec par l’Islam. Celui-ci, écrit Gouguenheim, « soumit le savoir grec à un sérieux examen de passage où seul passait à travers le crible ce qui ne comportait aucun danger pour la religion »[xxxii]. Il est évident que pour la religion, et plus particulièrement dans le cas d’une « Eglise-Etat »[xxxiii], l’arithmétique représente un moindre danger que la politique et la théologie, ce qui est précisément la thèse de Gouguenheim : « si des savants arabes ou persans ont produit des ouvrages de mathématique ou d’optique, la pensée islamique écarta de sa réflexion théologique, politique ou juridique le logos des Grecs »[xxxiv]. C’est ainsi l’ensemble de l’article de M. Lejbowicz qui est fondé sur l’ignoratio elenchi.

Il n'est pire aveugle que celui qui ne veut pas lire

   La tribune publiée dans Libération par « un collectif international de 56 chercheurs en histoire et philosophie du Moyen Âge » est intéressante à plus d’un titre. Comme Jacques Le Goff l’a fait observer, elle n’a été signée que par « peu des principaux médiévistes »[xxxv]. On peut en effet se demander si c’est parce qu’ils sont internationalement connus comme « chercheurs en histoire et philosophie du Moyen Âge » que Sylvain Auroux et Barbara Cassin figurent au nombre des signataires … Passons là-dessus car il y a plus grave. Les membres du collectif écrivent :

 « contrairement aux affirmations de l’auteur, le fameux Jacques de Venise figure aussi bien dans les manuels d’histoire culturelle, comme ceux de Jacques Verger ou de Jean-Philippe Genet, que dans ceux d’histoire de la philosophie, tel celui d’Alain de Libera, La Philosophie médiévale … ».

Gouguenheim aurait donc affirmé que Jacques de Venise ne figurait ni dans les manuels des historiens, ni dans ceux des philosophes ? Que le lecteur prenne la peine de se reporter aux pages 20, 106, 235 et 236 de son livre. Page 20 Sylvain Gouguenheim écrit : « Un autre phénomène est de nos jours largement ignoré, bien qu’il ait eu ses historiens : la vague de traductions de l’œuvre d’Aristote, effectuées directement à partir des textes grecs à l’Abbaye du Mont-Saint-Michel … ». Page 106 il dit de Jacques de Venise : « Si les philosophes ont reconnu son importance, grâce aux travaux de L. Minio-Paluello, les historiens ne lui consacrent guère d’attention ».  Pages 235-236 une note précise à propos de Jacques de Venise : « Son nom ne se rencontre guère dans les manuels. Signalons la remarque dubitative de B. Laurioux et L. Moulinier (Education et cultures …, op. cit. p.24) : on attribue à Jacques de Venise la traduction … ». On est ainsi fondé à se poser plusieurs questions : Alain de Libera ne figure-t-il pas au nombre des philosophes qui ont pu, grâce aux travaux de Minio-Paluello, reconnaître l’importance de Jacques de Venise ? Est-ce que « guère » signifie, en français, « pas du tout » ? Est-ce que « largement » est synonyme de « totalement » ? La distinction du général et de l’universel serait-elle inconnue de tous les maîtres de conférences de philosophie médiévale qui ont signé ce libelle ? Et enfin est-ce que « bien qu’il ait eu ses historiens » peut vouloir dire « parce qu’il n’a pas eu ses historiens » ?

Fallacia secundum quid et simpliciter

   A ne pas lire ce qui se trouve chez Gouguenheim, et à lire ce qui ne s’y trouve pas, on n’est évidemment pas en peine de déceler chez lui des « contradictions ». Les 56 chercheurs croient pouvoir en dénoncer deux. A supposer qu’elles fussent réelles, elles seraient insignifiantes par rapport à l’objet de son livre, mais ce n’est évidemment pas ce qui importe à ses détracteurs, décidés qu’ils sont à faire feu de tout bois. Il vaut toutefois la peine de les examiner toutes les deux.

   La première est celle-ci : « Charlemagne est crédité d’une correction des évangiles grecs, avant que l’auteur ne rappelle plus loin qu’il sait à peine lire ». Les pages incriminées ne sont pas indiquées, mais le lecteur trouvera p. 35 la première des propositions réputées constitutives de la contradiction : « Le biographe de Louis le Pieux (814-840), Thégan, note que, à la veille de sa mort, Charlemagne lui-même corrigeait le texte des Évangiles avec l’aide de Grecs et de Syriens présents à sa cour ». En poursuivant sa lecture jusqu’à la page 56, le lecteur tombera sur la seconde proposition : « Lui-même (Charlemagne) voulut apprendre à lire et à écrire – et réussit la première étape. Il assura à ses enfants une éducation élémentaire, qui servit la réputation de Louis le Pieux, une fois arrivé au pouvoir en 814. Sans être des princes lettrés, les souverains carolingiens s’entourent d’intellectuels, clercs et laïcs, et valorisent leurs compétences ». C’est sans doute le moment de rappeler ici la formulation aristotélicienne du principe de contradiction au livre Γ de la Métaphysique : « Il est impossible que le même attribut appartienne et n’appartienne pas en même temps au même sujet et sous le même rapport »[xxxvi]. Le lecteur de bonne foi peut-il comprendre, en lisant Gouguenheim, que c’est « en même temps », en l’occurrence à la veille de sa mort, que Charlemagne corrigeait (seul, sans l’aide d’intellectuels grecs et syriens) le texte des Évangiles et qu’il était toujours quasi analphabète ? Le lecteur de bonne foi, non, mais les 56 chercheurs, si.

   Passons à la seconde contradiction présumée : « la science moderne naît tantôt au XVIe siècle, tantôt au XIIIe ». Or Sylvain Gouguenheim avait écrit ceci : « Ce que nous appelons de nos jours « science » s’est développé à partir du XVIe siècle, bien que les premiers pas aient été accomplis dès le XIIIe siècle »[xxxvii]. La nature de ces premiers pas est précisée page 69 : un naturalisme qui « cherche à mettre en lumière les causes des phénomènes », l’abandon dès le XIIe siècle de l’explication symbolique au profit de « la recherche des lois auxquelles obéit le monde », ainsi que page 199 : pratique de dissections par Albert le Grand, correction par Campanus de Novare de certaines erreurs de Ptolémée, étude du magnétisme par Pierre de Maricourt, construction de miroirs paraboliques et calcul des angles de réfraction en fonction des angles d’incidence des rayons lumineux à travers l’eau, l’air et le verre par Witelo,  prise de distance avec Aristote chez Roger Bacon et les franciscains d’Oxford. Quant à ce qui manquait pour que la science moderne naquît véritablement, c’était clairement indiqué page 69 : « Il ne manque à cette démarche que la pratique expérimentale pour s’ériger en science ». C’est sans doute le moment de rappeler une fois encore la formulation aristotélicienne du principe de contradiction au livre Γ de la Métaphysique : « Il est impossible que le même attribut appartienne et n’appartienne pas en même temps au même sujet et sous le même rapport »[xxxviii]. Le lecteur de bonne foi peut-il comprendre, en lisant Gouguenheim, que c’est sous le même rapport que l’attribut « moderne » appartient et n’appartient pas au sujet «  science du XIIIème siècle » ?  Y a-t-il dans le propos de Gouguenheim davantage de contradiction qu’entre Socrate est blanc et sous un certain rapport Socrate n’est pas blanc ?  Tous les maîtres de conférences de philosophie médiévale qui ont signé ce texte – et Alain de Libera soi-même – seraient-ils si peu frottés d’aristotélisme qu’ils ignorent qu’en y dénonçant une contradiction ils se rendent coupables « du paralogisme connu au Moyen Âge sous le titre de fallacia secundum quid et simpliciter »[xxxix] ? Si l’on répond par la négative à ces trois questions, une quatrième s’impose irrésistiblement : est-il vraisemblable que ces 56 chercheurs aient réellement lu le livre de Gouguenheim avant de signer leur tribune ?  On trouvera un premier élément de réponse en apprenant dans Télérama[xl] qu’un certain nombre d’entre eux ont réclamé le livre de Sylvain Gouguenheim à Laurence Devillairs, directrice de la collection L’Univers historique aux éditions du Seuil, alors qu’ils avaient déjà signé leur manifeste. On trouvera un second élément de réponse, analogique celui-là, en lisant dans Le Figaro[xli] que l’un des initiateurs de la pétition de l’ENS-LSH, M. Zancarini, a admis que ses collègues s’étaient contentés de faire confiance aux organisateurs.

Libera nos a malo

   Il est impossible, et il serait fastidieux, de reprendre un à un tous les « arguments » qui ont été accumulés, de façon allusive et désordonnée, contre le livre de Sylvain Gouguenheim[xlii]. Ce n’est pas non plus nécessaire. S’il y avait de bons arguments à lui opposer, pourquoi lui en avoir opposé tant de mauvais ? Encore une fois, il ne s’agit pas ici de savoir si ce livre est contestable : contestable, quelle œuvre humaine ne l’est pas ? Il ne s’agit pas de savoir si ses thèses sont discutables, mais de voir comment elles ont été discutées et de s’interroger sur ce que cela signifie des conditions du débat intellectuel en France. Est-il conforme à la démarche scientifique et à la déontologie de l’historien, dont pourtant ils se réclament, que des dizaines d’universitaires aient osé condamner un ouvrage qu’ils n’avaient pas lu dans un texte débutant par ces mots : « Historiens et philosophes,  nous avons lu avec stupéfaction l’ouvrage de Sylvain Gouguenheim … » ? Quel crédit le non-spécialiste, qui n’est pas en mesure de faire lui-même œuvre d’historien, pourra-t-il leur accorder désormais ? Peut-on dénoncer l’idéologie au nom de la science à travers une démarche qui bafoue les règles élémentaires de la probité scientifique et que seul le parti-pris idéologique peut rendre intelligible ? La réception du livre de Sylvain Gouguenheim aura mis en évidence le climat délétère d’intimidation intellectuelle qui règne aujourd’hui. Celui-ci laisse peu d’espace au dialogue et peu de chances à la liberté de l’esprit.

André Perrin

(Adresser un commentaire : gilrich@wanadoo.fr)
 

Vous trouverez sur le site Mezetulle, à la page http://www.mezetulle.net/article-29568767.html, des liens vers un certain nombre des textes cités dans les notes ci-dessous.

[i] Thierry Leclère  Polémique autour d’un essai sur les racines de l’Europe  Télérama  2 mai 2008.
[ii]  Youssef Seddik  Grecs et arabes : déjà d’antiques complicités  2 mai 2008.
[iii] Sylvain Gouguenheim  Aristote au Mont-Saint-Michel  Seuil 2008 p. 11.
[iv] Ibid. p. 140.
[v] Ibid. p. 246 note 40.
[vi] Ibid. p. 255 note 16.
[vii] Alain de Libera  Landerneau terre d’Islam  Télérama  28 avril 2008.
[viii] On pourrait évidemment se demander si cette dernière référence ne relève pas de la « christianophobie ordinaire », seule forme d’anticléricalisme tolérée, voire même bien portée, dans le débat intellectuel contemporain.
[ix] Max Lejbowicz  Saint-Michel historiographe. Quelques aperçus sur le livre de Sylvain Gouguenheim  Revue internationale des livres et des idées  à paraître dans  Cahiers de recherches médiévales n° 16  2009.
[x] Gabriel Martinez-Gros et Julien Loiseau  Une démonstration suspecte  Le Monde des Livres  25-04-2008.
[xi] Un collectif international de 56 chercheurs en histoire et philosophie du moyen âge  Oui, l’Occident chrétien est redevable au monde islamique  Libération  30 avril 2008.
[xii] Blaise Dufal  Choc des civilisations et manipulations historiques. Troubles dans la médiévistique. 11 mai 2008.  M. Dufal est « doctorant » à l’EHESS et représentant élu de « Sud étudiant ». Il signe son texte sans faire état d’aucune de ces deux qualités et en se bornant à indiquer qu’il appartient à l’EHESS.
[xiii] Thierry Leclère art. cit.
[xiv] Youssef Seddik  art. cit.
[xv] Alain de Libera  Penser au Moyen Âge  Seuil  « Essais » p. 25.
[xvi] Paul Ricoeur  Histoire et vérité  Seuil 1955 p. 34.
[xvii] Alain de Libera  op.cit. p. 91.
[xviii] Ibid. p. 108.
[xix] Ibid.
[xx] Un collectif international de 56 chercheurs … art. cit.
[xxi] Alain de Libera  Landerneau terre d’Islam  art. cit.
[xxii] Beaucoup moins indirect car si oumma.com loue sur le même ton les travaux d’Alain de Libera et ceux de Sigrid  Hunke, Sylvain Gouguenheim, lui, ne les met pas sur le même plan. De Le soleil d’Allah illumine l’Occident, Gouguenheim écrit : « L’ouvrage mériterait d’être étudié page par page tant il déforme les faits, ment par omission, extrapole sans justifications et recourt au besoin à la tradition ésotérique ». (Aristote au Mont-Saint-Michel, op. cit. p. 203). Il ne dit évidemment rien de tel de Penser au Moyen Âge.
[xxiii] Un collectif international de 56 chercheurs … art. cit.
[xxiv] Ibid.
[xxv] Ibid. Le texte de Gouguenheim cité se trouve p. 136-137.
[xxvi] Sylvain Gouguenheim op. cit. p. 185-186.
[xxvii] Odette Petit et Wanda Voisin  La poésie arabe classique  Publisud 1989 p. 8-9.
[xxviii] Max Lejbowicz  art. cit.
[xxix] Ibid.
[xxx] Sylvain Gouguenheim  op. cit. p. 184.
[xxxi] Ibid.
[xxxii] Sylvain Gouguenheim  op. cit. p. 137.
[xxxiii] Nous empruntons cette expression à Maxime Rodinson De la tolérance en terre d’Islam in Méditerranéennes N° 06 MSH Paris février 1994.
[xxxiv] Sylvain Gouguenheim  op. cit. p. 164.
[xxxv] Jacques Le Goff  L’Express 15 mai 2008. Indigné par la véhémence des attaques dont Sylvain Gouguenheim a fait l’objet, Jacques Le Goff l’a invité, à titre de soutien,  le 2 juin, à son émission Les lundis de l’histoire.
[xxxvi] Aristote  Métaphysique  Γ, 3, 1005 b 20  C’est nous qui soulignons.
[xxxvii] Sylvain Gouguenheim  op. cit. p. 22-23.
[xxxviii] Aristote  op. cit  Ibid.  C’est encore nous qui soulignons.
[xxxix] Alain de Libera  Penser au Moyen Âge  op. cit. p.371.
[xl] Thierry Leclère  art. cit.
[xli] Paul-François Paoli  L’historien à abattre  Le Figaro  15-07-2008.
[xlii] Deux d’entre eux méritent toutefois d’être mis en rapport. On fait grief au livre de Gouguenheim d’énoncer des thèses d’une « parfaite banalité » et de faire prendre « de vieilles lunes pour des étoiles nouvelles ». Qu’Alain de Libera et quelques autres n’aient rien appris en lisant un livre qui se présente dans son avant-propos (p. 10) comme un ouvrage de vulgarisation, c’est, somme toute, assez normal. En revanche il est faux de prétendre que les légendes et la vulgate auxquelles s’en prend Sylvain Gouguenheim soient inexistantes ou inventées de toutes pièces pour être aisément réfutées. Pour s’en tenir au seul exemple d’Averroès, voici ce qu’on peut trouver sur le site Sciences buissonnières à l’article La bibliothèque d’Alexandrie : « La plupart des connaissances de l’antiquité ayant été transmises à l’occident par les traductions arabes telles celles d’Averroès ». Dès lors le reproche adressé à Gouguenheim d’avoir utilisé le procédé du « deux poids, deux mesures » en « reprochant » à Avicenne et à Averroès de n’avoir pas su le grec, mais pas à Abélard ou à Thomas d’Aquin tombe de lui-même parce qu’il relève d’une fausse symétrie : je n’ai, pour ma part jamais rencontré personne qui créditât Abélard ou Thomas d’Aquin d’avoir traduit Aristote du grec, mais j’ai dû plusieurs fois détromper des élèves de classes préparatoires qui en attribuaient le mérite à Averroès.

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