Retour à l'accueil  -  Textes et articles  -  Le don  -  Sentences, aphorismes et brèves remarques -  Lectures  -  Visages de la pensée  -  Liens et contacts

Retour à la liste des textes
 

Situations possibles par rapport à la philosophie

 

   C’est l’image du cercle qui pourrait nous aider à penser le rapport que nous entretenons avec la philosophie. Imaginons que nous tracions un cercle sur le sol comme Socrate aurait pu le faire lorsqu’il jouait à la pétanque.

   Trois positions relatives à ce cercle sont possibles :

- soit je suis extérieur au cercle

- soit je suis dans le cercle

- soit je suis à la limite du cercle

   En considérant que l’intérieur du cercle représente la philosophie, il y a donc trois manières possibles de se situer par rapport à celle-ci :

- soit la philosophie me laisse absolument indifférent et donc ne me concerne en rien

- soit la philosophie est au centre de mes préoccupations

- soit je suis dans cette position intermédiaire où le désintérêt n’est pas absolu, mais où j’en reste seulement à l’intérêt au sens familier : « c’est intéressant », ou mieux encore : « ça m’intéresse ». Dans le meilleur des cas il semble que ce soit dû à la prudence et à la modestie nées, trop souvent, de la fascination qu’exerce une certaine représentation de la philosophie.

   Sans nous interroger pour l’instant sur celui qui se dit extérieur à la philosophie, nous sommes en droit de nous demander comment celui qui a de l’intérêt pour la philosophie peut être repéré comme n’étant pas dans un rapport vrai à la philosophie. Car enfin sa bonne volonté ne fait pas l’ombre d’un doute, et d’ailleurs cela se manifeste bien souvent dans un désir de lire, dans la quête du livre à lire ; sa bonne volonté devant lui permettre de quitter la circonférence pour entrer de plain-pied dans l’aire de la philosophie.

   Mais précisément ce n’est pas une question de bonne volonté si l’on entend par là une inclination d’ordre psychologique qui laisserait intact ce que je crois être. Le passage à la philosophie se fait par la dure et terrible épreuve de la déception : nul confort psychologique, nulle confirmation de ce que j’ai pensé jusqu’alors. Entrer dans l’aire de la philosophie, c’est faire un saut sans parachute pour ne plus être sot !

   En quoi précisément consiste cette déception ?

   Etre à la limite c’est croire encore que mes questions sont de bonnes questions et que la philosophie a pour fonction de venir répondre à ces questions en confirmant ce que je croyais jusqu’alors, comme si la philosophie m’autorisait à affirmer haut et fort ce à quoi j’ai toujours cru.

   En d’autres termes j’étais persuadé de me résumer à ma dimension psychologique et de ce fait à mes opinions : être déçu c’est mourir à ces opinions.

   L’image du cercle que nous avons utilisée pour penser le rapport à la philosophie manifeste maintenant ses limites. En effet être à la limite ou hors de la philosophie n’indique pas une différence de nature, mais une simple variation psychologique qui indique le degré d’attachement à l’opinion.

Christian Ferron

Retour à la liste des textes
 

Retour à l'accueil  -  Textes et articles  -  Le don  -  Sentences, aphorismes et brèves remarques -  Lectures  -  Visages de la pensée  -  Liens et contacts