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Le droit des générations futures

   Il a longtemps semblé que, pour s’affirmer, l’homme devait nier la nature. Ainsi, tout au long de son histoire, l’humanité a cherché à s’émanciper des contraintes naturelles grâce au développement de la technique. Ses pouvoirs se sont tellement étendus que l’humanité est aujourd’hui capable d’amener, au nom de ses intérêts présents, des modifications et des dégradations irréversibles à son milieu (exemple: les organismes génétiquement modifiés etc.). Ces modifications et dégradations, nous n’en saisissons pas encore scientifiquement toute la portée, de telle sorte qu’il est légitime de se demander si le monde de demain sera encore vivable. À cette question, certains répondent que la science et la technique pourront toujours remédier aux problèmes qu’elles n’ont qu’accidentellement engendrés. Qu’“on n’arrête pas le progrès” et qu’il faut aller de l’avant au lieu de s’accrocher au mythe de la nature: nous pourrions, par exemple, aller vivre sur Mars! Mais n’est-ce pas faire preuve d’une confiance aveugle en la science? La science n’est pas une religion; là où on ne sait pas, ne vaudrait-il pas mieux faire preuve de prudence?
   Doit-on alors, par prudence, et par des moyens juridiques, chercher à limiter les pouvoirs de l’homme sur la nature, tout comme on cherche à limiter les pouvoirs de l’homme sur l’homme grâce aux droits de l’homme? Au nom de quoi pourrait-on instaurer des lois écologiques? Il est manifeste que face aux intérêts en jeu, la seule émotion ou même la bonne volonté ne saurait suffire. Pourrait-on alors le faire au nom d’un supposé “droit de la nature”? Cela consisterait à faire de la nature un sujet de droit. Mais, tout droit suppose une réciprocité: on reconnaît un droit envers un sujet qui doit être lui-même libre et capable de se reconnaître des devoirs. Or, il n’y a pas, de ce point de vue, de réciprocité entre la nature et nous. Pourtant cela ne suffit pas pour conclure qu’il n’y a pas de droit de la nature, car nous reconnaissons bien des droits à des êtres avec lesquels il n’y a pas de réciprocité de fait: les enfants, les handicapés etc. Une autre question se pose: si on reconnaît que la nature est sujet de droit, est-ce que cela concernera la nature prise en sa totalité? Si oui, alors il faudra considérer même le moindre virus ou la moindre bactérie comme ayant des droits! L’idée d’un droit de la nature semble trop problématique pour qu’une juridiction puisse s’y rapporter, il faut donc trouver autre chose. Pourrait-on alors limiter nos intérêts et nos pouvoirs technologiques actuels au nom de l’intérêt des générations futures? Vu que l’homme a des pouvoirs nouveaux, il doit se reconnaître une responsabilité nouvelle. Avant, quand nos pouvoirs étaient limités, nos responsabilités étaient toujours individuelles, limitées à nos concitoyens et à nos contemporains, mais aujourd’hui ne faudrait-il pas aussi reconnaître et légiférer sur des responsabilités collectives, envers toute la planète ainsi qu’envers les générations futures?

Léonard & Julien Saiman

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